Implication du monde universitaire aux défis et stratégies de l’économie sociale et en solidaire en Amérique latine

En Amérique latine, le concept d’économie sociale et solidaire, les organisations qui la composent, ainsi qu’un cadre normatif qui les définit sont multiples. On distingue trois types d’organisations appartenant à cette économie : a. les coopératives – de différents types -, les mutuelles, les syndicats ; b. les fondations, associations et entités philanthropiques, entre autres ; c. les organisations de nature informelle, dans de nombreux cas, qui émergent de secteurs marginalisés et en réponse à l’économie capitaliste.

Dans ce dernier type, certains pays incluent l’économie populaire, tant dans la législation que dans les processus de pratiques sociales et économiques (Martí, et al., dans Cepal, 2023 : 58-61).

Le soutien à l’ESS en termes de renforcement, de promotion et de protection est assuré avec la participation du monde universitaire, de diverses instances du pouvoir public, d’instituts de recherche et des organisations elles-mêmes qui composent cette économie, entre autres. La compréhension de cette économie est obtenue grâce à des résultats de recherche, de conseil et de consultation dans divers domaines qui expliquent comment ces organisations transforment l’économie ; ces processus de recherche produisent des méthodologies, des concepts et des innovations sur des sujets qui contribuent à la compréhension de l’ESS. Dans certains pays d’Amérique latine, des établissements d’enseignement proposent des programmes universitaires en économie sociale et solidaire, ainsi que des services techniques d’apprentissage et de formation supérieure sous forme de spécialisations, de masters et de doctorats, ainsi que divers réseaux regroupant des universités tels que Rulescoop, Unicosool, Oibescoop, CIRIEC (par pays).

Lors de la Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique (COP16), qui s’est tenue à Cali, en Colombie, du 21 octobre au 1er novembre 2024, diverses plateformes soutenant le développement local et mondial ont été regroupées sous le nom d’Économies pour la vie (Ecoovida) (concept proposé par Mora Jiménez, Henry M., Hinkelammert, Franz J, 2005). À partir des rencontres de la COP 16, un Pacte international des économies pour la vie a été proposé, qui couvre des thèmes propres au développement local et territorial.

Outre les instances qui ont participé à Ecoovida, divers réseaux universitaires étaient présents avec leurs propres propositions, concluant que la COP 16 a permis de mettre en évidence le lien entre l’ESS et les transitions environnementales, où l’entreprise coopérative joue un rôle fondamental en tant qu’entité idéale pour maintenir les projets environnementaux.

Un exemple clair de coopératives et d’environnement est illustré par l’expérience, en Colombie, de la coopérative Canapro – Cooperativa Casa Nacional del Profesor – ; coopérative multi-activités créée par les professeurs de l’enseignement secondaire supérieur en Colombie (+50 000 associés) et près de 150 millions de dollars d’actifs comptables. La coopérative gère le projet environnemental basé sur la reforestation commerciale et la restauration des forêts par la certification des crédits carbone, en éliminant 297 261 tonnes de CO2e vérifiées pour la période 2011-2020. La coopérative participe à un projet de plus grande envergure, le Grouped Project for Commercial Forest Plantations Initiatives in The Department Of Vichada, qui s’étend sur une période de 30 ans et se terminera en 2041. Canapro est un exemple clair parmi tant d’autres expériences en Colombie et dans d’autres pays d’Amérique latine qui doivent être comprises et protégées dans leur spécificité et contribuer à leur pérennité et à leur développement. Ceci est soutenu par le maintien de la spécificité de l’ESS dans le débat intellectuel et dans la compréhension des pouvoirs politiques.

L’association CIRIEC Colombia englobe diverses propositions en faveur de l’économie sociale et solidaire. En février 2025, elle est dénombre quatre institutions et 31 membres personnes physiques ; son objectif principal est de contribuer au développement des territoires et de l’économie publique, sociale et solidaire.

L’objectif est atteint grâce à un travail d’équipe qui comprend :

1. Des discussions virtuelles sur des sujets qui seront abordés lors du colloque annuel
2. VIII Coloquio , qui se tiendra les 25, 26 et 27 août 2025. Les thèmes proposés sont les suivants : récits et discours de l’économie sociale et solidaire ; mesure de l’action coopérative ; croissance de l’ESS ; année internationale des coopératives ; expériences émergentes et nouveaux acteurs ; application des nouvelles technologies à l’ESS ; transitions environnementales et coopératives.
3. Documentation et publications : éditer la revue CIRIEC Colombia ; publier un bulletin en accord avec Coomeva ; maintenir la publication de l’encyclopédie du droit coopératif – en ligne – écrite par le professeur Alberto García-Müller (1945-2024) en collaboration avec l’Association civile ibéro-américaine de droit coopératif, mutualiste et de l’économie sociale et solidaire. De manière plus large, les professeurs liés au CIRIEC Colombie ont publié des articles scientifiques et des chapitres de livres [1], certains en collaboration avec des chercheurs d’autres sections nationales du CIRIEC. Les textes mettent en évidence la participation des associations et des coopératives dans les propositions environnementales et de transformation des territoires, le genre et les coopératives et d’autres sujets.
4. Relations interinstitutionnelles, le CIRIEC Colombie soutiendra le programme académique de l’événement latino-américain de Pensamiento Cooperativo (26-28 juin 2025, Santa Marta, Colombie), événement organisé par Fensecoop – Fédération nationale des coopératives du secteur éducatif colombien. En 2024, des professeurs d’universités liées au CIRIEC Colombie ont participé à la création du Réseau ibéro-américain de promotion de l’économie sociale et solidaire[2]. Le professeur Juan Fernando Álvarez, directeur de la spécialisation en gestion des entreprises de l’économie sociale et solidaire (Université Javeriana) et membre du Conseil scientifique international du CIRIEC, intégrera à partir de 2025 le groupe de travail technique sur la « Mesure de la contribution économique des coopératives et les statistiques de l’économie sociale et solidaire des Nations unies (TWG-MECC) ».

De leur côté, les programmes universitaires et les professeurs des universités du CIRIEC Colombie contribuent à des programmes tels que le Service jésuite panamazonien et l’Association des universités jésuites dans le but de fonder le réseau d’économie sociale et solidaire, de s’associer au réseau Prodepaz avec des dirigeants de communautés vulnérables et de mener de multiples activités avec des étudiants liés aux pépinières de recherche en économie sociale et solidaire.

En conclusion, nous continuons à travailler ensemble pour maintenir la présence et l’activité de l’ESS.

Références

Martí J-P., Radrigán, M., Borge, D., Jácome, H., Pereira L., Bucheli, M., Rojas, J, Schujman, M (2023) 45-64. Dans : Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPAL), Revista CEPAL, n° 140 (LC/PUB.2023/15-P), Santiago, 2023.

Mora Jiménez, Henry M., Hinkelammert, Franz J./ Vers une économie de la vie. Henry M. Mora Jiménez, Franz J. Hinkelammert —1ère éd.— San José, Costa Rica : DEI, 2005. 427 p. ; 17 cm. (Collection Économie-Théologie).

[1] Certains articles peuvent être consultés sur : https://doi.org/10.24857/rgsa. v18n12-064 ; https://doi.org/10.56238/arev6n4-123 ; https://www.uhu.es/publicaciones/ojs/index.php/RIESISE/article/view/8343 ; https://doi.org/10.5585/2024. 23 702 ; https://doi.org/10.1007/978-3-031-52656-5_4 ; https://www.oibescoop.org/wp-content/uploads/ES-y-Solidaria-y-Genero.pdf

[2] Brésil, Chili, Colombie, Espagne, Guatemala et Mexique.